Pas au bon endroit [solo]

Jusqu’à présent, Alfonzo s’était senti comme un individu qui n’avait pas sa place dans le tournoi. Comme si on mettait sur le ring un joueur d’échec contre un boxeur. Il avait pourtant fait ce qu’il savait faire de mieux : réfléchir et s’adapter. Il semblerait pourtant que c’était la prouesse physique de son adversaire qui lui avait valu la victoire. L’homme masqué n’était ni déçu, ni triste à cause de sa défaite, il était tout simplement rempli d’une multitude d’interrogations supplémentaires.

Du reste on lui avait conseillé de faire un tour à l’infirmerie pour qu’il puisse soigner ses blessures, ce dont il aurait pu se passer, car il avait bien expliqué qu’il n’avait pas besoin de soins, mais on avait pourtant insisté. Donc le voilà assis sur un lit d’hôpital à attendre qu’on vienne s’occuper de lui. Ce temps lui permis entre autre de refaire le scénario de son combat contre sa comparse blonde. Tout était dans sa tête à présent et il lui suffisait de rejouer le match, comme s’il jouait les deux côtés d’une partie d’échec. Maintenant qu’il connaissait les compétences de Min Min, il pouvait donc aussi essayer de simuler ses actions. Il arriva éventuellement à un scénario où il prenait le dessus sur elle, mais pourtant il savait que ce n’était qu’en termes de probabilités, dans les propres conditions qu’il avait construite. Nul doute qu’en pratique, son adversaire aurait trouvé quelque chose pour mettre à mal sa simulation.

Il pensa alors à un outil qui lui permettrait de vivre différents scénario. Cela pourrait ressembler à un sablier et…

Non !

Alfonzo secoua la tête nerveusement. Il était hors de question qu’il pense à développer ce genre de chose. N’était-ce pas ce qui avait mené son prédécesseur à devenir détestable ? Il fallait qu’il trouve autre chose. Ou juste rien du tout ? Il ne devait pas non plus se sentir obligé de réfléchir à quelque chose qui n’était pas essentiel. Sa réflexion s’arrêta là car une infirmière s’approcha de lui pour l’ausculter. Alfonzo se laissait faire, sans trop se poser de questions, puis la dame remarqua d’un air perdu.

« C’est étrange, on m’a pourtant renseigné sur le fait que vous aviez subit des brûlures et des coups de poings, mais… rien !
- C’est pourtant vrai. Mais j’ai fait savoir que je n’avais pas besoin de soins.
- Et donc vous n’avez pas de blessures apparente.
- C’est exact.
- Pas de douleur interne ?
- Non, je me sens simplement fatigué.
- Alors reposez-vous, j’imagine ?
- Inutile. Mon adversaire n’a fait que disperser une partie de mon énergie, et je dois la récupérer d’une manière ou d’une autre.
- Mais comment ?
- L’éclat de cette étoile devrait être suffisant dans l’immédiat, ainsi que la présence de certains gaz présent dans l’air. Fit-il en pointant tout simplement du doigt la fenêtre qui laissait passer la lumière du jour vers lui.
- Donc en fait, vous êtes comme une plante, c’est ça ?
- Hmmm… c’est plus compliqué que ça encore.
- Bon ok, je vais laisser tomber je crois. Vous êtes pas le premier type bizarre dans le coin après tout. Vous avez besoin de quelque chose d’autre ?
- Hé bien, maintenant que vous posez la question, je pense que quelque chose m’aiderait à booster ma récupération oui.
- De quoi s’agit-il ?
- Au bas mot, je dirais… Onze kilogrammes de glucose, pour refaire complètement le plein.
- Attendez… quoi ? Vous voulez consommer Onze kilo de sucre, c’est bien ça ?
- C’est exact, si possible. »

L’infirmière faisait les gros yeux pendant un moment, puis parut perdue l’instant d’après, avant de poursuivre.

« Ok euh... alors, je pense que vous n’avez rien à faire à l’infirmerie, mais plutôt au réfectoire, si vous voulez mon avis.
- C’est exact ! C’est ce que j’ai pourtant affirmé avant qu’on me force à venir ici !
- Dans ce cas, je vous en prie. »

L’infirmière leva un bras vers la sortie, avec un sourire légèrement crispé. Alfonzo sortit du lit et reparti comme si de rien n’était. L’infirmière le regarda partir et se mit à marmonner.

« Onze kilo de sucre ? Vraiment que des fous ici, j’aurais tout vu. »

Puis elle haussa les épaules avant de reporter son attention sur son carnet pour vérifier le prochain patient sur la liste. C’était un jour tout à fait normal dans une infirmerie du cross-univers.