[Abandonné] Le bon chemin [PV Doomguy]

...passé le flash et le courant d'air si soudain de ce nouveau monde, Alfonzo se retrouvait à flotter pendant une seconde à moins d'un mètre du sol, jusqu'à ce qu'il se fasse surprendre par un phénomène plutôt gênant. Ici la gravité devait bien être trois fois plus forte qu'à l'académie, et ça il le ressentit de façon plutôt violente. Son corps bascula vers le bas jusqu'à frapper le sol et il fut à genoux, main plaquées sur de l'herbe sèche mêlée à de la poussière ocre. Il gémit un instant, haletant cet air si sec. Il mit quelques secondes à se rendre compte de l'absurdité de sa situation. Il était écrasé par la gravité si soudaine comme une... bah oui n'ayons pas peur des mots, écrasé comme une merde !

Mais ce n'était pas vraiment un drame. Un Stellarion savait s'adapter assez rapidement à son environnement gravitationnel du moment que ce n'était pas non plus à proximité d'un trou noir, faut pas non plus déconner quoi. Il mit un peu de temps à se recalibrer sur sa nouvelle masse et se releva doucement, sans prendre la peine d'avoir recours à la lévitation. Ces bonnes vieilles jambes serviront pour le moment, le temps qu'il s'habitue aux lieux. Il s'épousseta légèrement et observa derrière son masque le spectacle de désolation qui s'offrait à ses yeux carmins. Il était donc arrivé sur un astre tellurique, c'était déjà pas si mal. Il nota également la présence d'une étoile. Bonne chose également. De la vie aussi sans doute ? Il n'était pas expert en chimie mais il savait au moins qu'une atmosphère bleue voulait dire beaucoup de choses. Idem pour cette végétation, mais végétation ne rime pas avec vie intelligente avancée. Il se demandait déjà s'il allait pouvoir interagir avec quelqu'un ou quelque chose, n'importe quoi, même un insecte.

Il analysa les effets de cette étoile sur lui, elle devrait suffire pour recharger ses réserves de façon constante et satisfaisante. Peut-être existait-il même un ou plusieurs satellites qui pouvaient refléter une partie de sa poussière la nuit ? Ce serait tout à fait bienvenue.

Pourtant il lui manquait quelque chose, de très importants, ce n'était pas essentiel pour sa survie, mais plutôt pour sa santé mentale. Il lui fallait du sucre ! DU SUCRE ! Le jeune homme albinos regrettait presque d'avoir dû laisser de côté le Glucosium, ce synthétiseur à molécule glucosée fabriqué par une de ses sœurs. Le manque pourrait vite le gagner.

Il regarda à droite puis à gauche. Il voyait des montagnes au loin, mais sinon les alentours était désespérément... inhospitaliers. Par où aller ? Peut-être que l'orbe le savait, elle ? Ah non, elle posait juste des questions. Peut-être alors que la réflexion sur une question l'aiderait à se décider. Il piocha à l'intérieur de sa longue veste grise et sorti une sphère remplie d'une fumée aux nuances de blanc et de noir. Tout tournoyait d'abord jusqu'à ce que des mots se forment.


Un petit grognement de la part d'Alfonzo et sa main qui se crispa sur l'objet.

- Je te déteste, bien cordialement !

Il se mit à soupirer. Il ne lui restait plus qu'à faire plouf-plouf. Cette perspective ne l'enchantait guerre. Avant de se décider, il croisa tout de même les bras et observa plus attentivement les alentours.

Le Doom Slayer tremblait littéralement de rage.

Il était coincé ici, dans un endroit inconnu, après avoir chuté dans ce maudit portail. Les prêtres infernaux s'étaient joués de lui comme un loup se jouait d'un lapin : rien ne s'était déroulé comme prévu. Il était le chasseur, les démons incarnaient les proies. Il se devait de rester au dessus, de maintenir le fossé protecteur entre les horreurs infernales et le reste de la galaxie, de déchirer, de massacrer, de démolir et pourtant...

Il s'était fait avoir comme un débutant.

C'était irritant. Très irritant.

Le Slayer dût se retenir pour ne pas fracasser un arbre à coup de pied. Il ne savait rien de cet endroit, il fallait mieux éviter de marquer sa présence sur le paysage. L'homme canalisa sa colère, posa une main assuré sur son fusil d’assaut, et s'allongea au beau milieu des herbes longues qui l'entouraient depuis son atterrissage sur cette planète. L'endroit semblait paisible mais, dans la vie du Doom Marine, rien n'était jamais vraiment paisible. Quelque part, dans le fond de son âme, ce dernier ne désirait qu'une chose : que l'endroit ne soit pas paisible. Un démon à massacrer lui permettrait de laisser libre court à sa frustration sur quelque chose de vivant, ou de mort, qui répondait tout du moins.

"J'ai terminé mon analyse."

Cela faisait précisément trois minutes et quarante cinq secondes que VEGA, bien au chaud dans l'armure de son propriétaire, cherchait à établir un diagnostique de crise. Rien dans cette situation n'arrangeait les processeurs de l'IA la plus puissante de toute la planète Terre. Elle ne connaissait pas cette dimension, la route que ce portail venait de leur faire prendre à travers la réalité lui était inconnue et, plus inquiétant encore, son lien vers le téléporteur de la forteresse de la Ruine ne fonctionnait plus. Le Slayer était coincé ici.

En terme tactique, ce contretemps était un désastre.

"Cette nouvelle dimension, que je viens de renommer U-01 pour les besoins de l'archivage, n'est pas dans ma base de donnée. Nous sommes peut être les premiers terriens à mettre les pieds dans cet endroit. La téléportation est hors d'usage. Mon diagnostique ne met pas en avant la raison précise de ce dysfonctionnement, mais notre lien avec la..."

Le Slayer, qui n'écoutait le briefing que d'une oreille, bougea soudainement sa jambe arrière droite. Puis sa jambe arrière gauche. Il se mettait en mouvement, aussi doucement que possible.

"Auriez vous remarqué quelque chose ?"

Le guerrier, bien trop occupé à observer les environs, se contenta comme toute réponse de bouger lentement un doigt vers la mise au point de sa lunette de tir.

Dans sa tête, une musique de plus en plus violente montait en puissance.

"Oh, je vois."

VEGA, qui voyait très clairement à travers le viseur de son propriétaire désormais, pouvait observer le jeune garçon à sa guise. Humanoïde, la vingtaine, cheveux blancs, masque finement ciselé. Certainement pas un terrien, et ses habits amples cachaient peut être des armes d'un genre nouveau. Actuellement, il était occupé à observer les environs.

Rien n'indiquait qu'il avait repéré le Slayer.

Si il fallait prendre le tir c'était maintenant ou jamais.

"Je ne connais pas cette forme de vie humanoïde. Elle constitue une possible source d'information précieus..."

L'intelligence artificielle n'eut même pas le temps de terminer sa phrase que le Doom Marine se redressait soudainement, faisant voler une bonne partie de l'herbe autour de lui au passage. Il rangea son fusil d’assaut avec la rapidité qui faisait sa légende, dégaina son double fusil à canon scié, son "super shotgun" comme l’appelait les terriens, et se dirigea vers le "nouveau venu". Il avait l'intention d'aller au contact. Pour ouvrir en quatre ou pour observer, ce serait à cet humanoïde inconnu de choisir.

VEGA nota dans un coin de sa mémoire que l'armure prétorienne n'était peut être pas la tenue la plus approprié pour un premier contact. Il nota également que le Slayer n'était pas fait pour le contact social tout court, mais à situation désespéré...

En tant qu'érudit de l'académie, toutes les choses qui se trouvaient actuellement autour de l'être stellaire était comme une fascination permanente, quelque chose de grisant. Pourtant il se cachait bien de montrer son admiration, il n'était pas du genre à être très expressif. Depuis sa naissance, sans jamais avoir l'occasion de quitter les enceintes de l'établissement, il n'avait vu que le cosmos. Oh bien sûr il avait déjà observé la surface d'une ou deux planètes grâce à l'optique la plus efficace de l'observatoire, c'était un bon divertissement d'ailleurs, mais il restait détaché du véritable spectacle qui s'y produisait. Là cependant, être projeté réellement dans un lieu de ce type était déjà plus saisissant. C'était un peu comme de la réalité virtuelle, la forme la plus aboutie qu'elle puisse avoir.

A une dizaine de mètre devant lui, un corbeau vint se percher sur le crane d'une créature depuis longtemps consommée. L'oiseau noir de jais tournait la tête mécaniquement et se mettait de temps en temps à croasser. Alfonzo sorti finalement de son inaction en décroisant les bras. Le corbeau venait de le repérer et surveilla aussitôt ses prochains faits et gestes. Il fouilla alors dans sa poche son bloc-note et commença à écrire.

Contact visuel avec un organique volant. Il semblerait qu'il adopte une stratégie primitive consistant à observer et jauger la menace possible. L'approche sera difficile, mais peut-être possible dans l'éventualité où je miserais sur une relation de confiance avec de la nourrit-

Il entendit aussitôt un croassement plus intense et des bruits d'ailes. Il releva la tête aussitôt pour se rendre compte que l'oiseau de malheur venait de lui fausser compagnie. Il grimaça derrière son masque afin d'exprimer sa déception, mais haussa bien vite après les sourcils en voyant les reflets du soleil se refléter sur une armure de forme humanoïde et qui s'approchait vers lui de façon plutôt déterminée. Il s'attela à coucher autre chose sur le papier avant de refermer le bloc-note en vitesse.

Laissez tomber les créatures primitives...

Il rangea de nouveau ses notes dans son blouson et croisa les bras. Le mouvement des épaules et du corps de la silhouette mystérieuse faisaient preuves d'une démarche assurée.

A mesure qu'il approchait, l'albinos remarqua quelque chose dans sa main. C'était probablement un outil, mais un outil cela pouvait avoir plusieurs fonctions selon son porteur. Les probabilités que l'individu utilise cet outil contre sa propre personne n'étaient pas à négliger. Aussi, n'ayant aucun recul sur la limite entre le bien et le mal, Alfonzo ne se senti pas plus alerté que ça. Il s'agissait tout simplement pour lui d'un être qui s'approchait de lui. Le jeune homme préférait rester silencieux. Il avait lu dans un livre par exemple que des organiques pouvaient s'entretuer à la première parole déplacée, mais que cela pouvait aussi être interprété comme un signe de réconciliation.

Il n'osa même pas dire "bonjour", peut-être que son interlocuteur comprendrai "je te déteste". Toutes ces réflexions tordues ne l'aidaient pas à se décider et il resta planté là à observer de son regard de braise l'espèce d'armure bipède qui s'approchait. Il ne prit pas non plus la peine de s'écarter de son chemin. Alfonzo déduisait que le bonhomme allait sans doute le contourner. Peut-être avait-il tort, c'était même fort probable.

Le Slayer, qui ne savait pas comment prendre le manque de réaction de l’humanoïde, contourna le nouveau venu avec une lenteur forcée. Il ne s'arrêta pas derrière lui et choisi, plutôt que de s'éloigner, d'en faire le tour complet. Il voulait l'observer de plus près. Les muscles du combattant, plongés dans une tension permanente, se préparaient pour le moindre mouvement brusque, la moindre tentative d'hostilité, mais rien n'advenait. Il n'y avait aucune réponse visible de la part de cet étrange individu masqué qui ressemblait, de fait, à un mystique. Sur terre comme sur Argent D'Nur les masques signifiait un certain statut qui impliquait, en règle général, une certaine forme de pouvoir spirituel sur une communauté. VEGA nota dans un coin de sa mémoire vive que, si l'individu était bien présent, les habitants de cette dimension n'avait peut être aucune idée de ce qu'était la violence physique avant de faire chauffer son processeur. Aucune réaction, ça voulait dire aucune reconnaissance visible : peut être que le Slayer et cet être étrange ne vivait tout simplement pas sur le même plan d'existence. Peut être que l’humanoïde interagissait avec une composante différente de la réalité. Si tel était le cas le plan des maitres infernaux se révélait dans sa gloire maléfique : si le Doom Marine était coincé dans un univers ou les formes de vies conscientes ne pouvaient pas le percevoir, sortir de cet endroit allait s’avérer plus que difficile. Aussi invincible que sa rage le rendait, le Slayer ne pouvait pas tout faire. Il allait avoir besoin d'aide pour comprendre, maitriser et battre cette situation.

D'un autre coté, se figer devant un prédateur était une tactique qui dépassait les frontières des dimensions.

VEGA, qui allait faire une recommandation portant sur l'utilisation d'une forme de langage écrit pour tenter de communiquer, n'eut pas le temps d'ouvrir la bouche que le Slayer attrapait déjà les habits de son "interlocuteur" à une vitesse remarquable, histoire de le tirer fermement vers sa personne. Il n'aimait pas ça. Le jeune homme respirait la magie, et la magie ne lui jouait que des mauvais tours depuis bien des années. Il n'avait pas confiance et, lorsqu'une chose n'attirait pas la confiance du Doom Slayer, il l'attirait vers lui sans grand ménagement. C'était au corps à corps qu'il était le plus efficace, le plus violent. Plus une chose était dangereuse, plus elle se retrouvait a proximité.

En ce sens le Doomguy inversait des millénaires de tactiques militaires humaines mais ce n'était pas son problème : il était plus qu'un homme. Il incarnait la rage. Ce n'était pas une brindille masqué qui allait se mettre en lui et la sortie de cet endroit.

Le voilà qu'il tournait autour de lui comme un charognard, mais ce comportement n’impressionna pas le moins du monde l'être stoïque derrière son masque. Au contraire c'est avec curiosité qu'il observait le comportement de l'individu. Ce dernier le toisait, mais pourquoi ? Y avait-il une explication logique ? Était-ce dans son instinct d'organique que de le regarder sous tous les angles ? Alfonzo mourrait d'envie de reprendre son carnet à l'intérieur de sa veste afin d'y apposer chacune de ses réflexions, mais même s'il avait eu l'idée de le faire, maintenant il n'en aurait plus l'occasion, du moins dans l'immédiat.

Ce fut assez violent, mais cette brute venait de l'empoigner d'une poigne solide, agrippant le tissu de qualité de son habit gris-argent. Il l'attira un peu vers lui et Alfonzo ne put réprimer un petit hoquet de surprise. Une intimidation ? Fort probable. Un danger ? A n'en pas douter. L'être stellaire n'en perdit pas pour autant son sang-froid et opta alors pour une approche différente. Maintenant que l'humanoïde puissant l'avait sous son emprise, parler ne risquait pas d'empirer la situation. C'est du moins ce qu'il espérait. Il s'éclaircit légèrement la voix avant de commencer.

"Hé bien... c'est un fait, vous tenez là le rôle du dominant. J'aimerais quand même que vous considériez l'importance que j'attache à mon habit. Peut-être d'ailleurs pourrions-nous converser, si vous aviez par chance la faculté d’interagir par vocalisation. Dans d'autres cas, j'essaierai de m'adapter à tout autre moyen de communication."

Il ne voyait rien au travers de ce casque sombre et aurait au moins souhaité voir sa réaction, mais Alfonzo ne se rendait pas compte qu'il était lui-même caché derrière un masque. L'habitude était tellement présente qu'il en oubliait presque ce détail. Aucun moyen donc pour l'un ou pour l'autre de trahir un sentiment par des mouvement faciaux. C'est comme si une barrière se posait entre eux. Il devait bien exister un moyen de se faire comprendre. Puis Alfonzo se demanda à un moment s'il n'existait dans ce monde que des êtres intelligent s'exprimant par la force physique.

Si cet hercule en armure avait voulu s'exprimer d'une quelconque manière en l'empoignant de la sorte – sans doute une façon pour lui de dire bonjour – alors l'albinos serait complètement dépassé par la situation.

L'idée lui passa par la tête de répondre à l'action de son interlocuteur par une gifle, mais Alfonzo oublia rapidement cette idée. Certaines expérimentations pouvaient tourner mal. Il n'avait pas la carrure physique pour survivre à une conversation physique si brutale. Si les arguments de l'homme en face de lui se traduisaient par des actes physique plus violent encore, il risquait d'y passer. Une autre option était la fuite. Des fois la barrière de la langue était trop importante pour qu'on se risque à essayer de comprendre.

C'est ainsi que toutes les hypothèses de VEGA concernant l’humanoïde au masque, et sa présupposée appartenance à une autre dimension, s’effondrèrent telles un chateau de cartes mal construit.

L'IA, bien qu'un peu dégoutée par le tournure "classique" que prenait les événements, se mit à compiler de plus bel. Cette phrase, signe indéniable de la présence d'une intelligence supérieure, amenait avec elle un grand nombre d'informations. Il y avait les concepts qu'elle exprimait : domination, habillement, conversation... Toutes ces choses renvoyait à une créature civilisé, un être capable de renseigner le Doom Slayer sur cet endroit, ces habitants, et bien évidemment sur les éventuels points de sorties. Ce qui intéressait ce dernier, en vérité, c'était le mot domination. Une civilisation qui comprenait ce mot n'était pas sans défense face à l'inconnu : si les suppôts infernaux décidait d'envahir cette dimension, il n'aurait certainement pas à faire font seul. En bref, la situation était bien plus avantageuse que ce que VEGA et son propriétaire avait pût être amenés à croire.

Peut être qu'il y avait un moyen rapide de quitter ce piège ignoble...

Le Slayer, qui n'avait aucun intérêt à combattre un humanoïde aussi faible sans raison valable, lâcha son nouvel interlocuteur d'un petit mouvement sec avant de ranger son fusil à pompe sur le coté. Il n'en aurait pas besoin tout de suite de toute façon, et si cette petite chose essayait de lui les doigts en travers de la gorge il lui suffirait de sortir ses poings et de l'ouvrir en deux pour mettre un terme à la faible menace. Il ne risquait, en définitive, pas grand chose. Les humains ne valaient rien au corps à corps, surtout contre un mutant incarnant la Rage.

Si il y avait bien une chose qu'une guerre multicentenaire avait appris au guerrier légendaire, c'était que le physique des humains normaux se montrait démesurément fragile en situation critique. La seule chose qui leur permettaient de survivre efficacement était leur remarquable intelligence tactique. Sans elle, les humanoïdes ne valaient littéralement pas mieux qu'une bonne balle de fusil à pompe dans le torse.

VEGA, qui savait fort bien que le Doom Marine n'était pas fait du même bois que les diplomates, décida de prendre la parole. Une petite interface auditive, située juste à l'extérieur du casque de l'armure prétorienne, lui permettait de prendre la parole, en règle générale pour permettre à un humain un peu plus collant que les autres de dégager du chemin de son propriétaire, et de déployer toutes ces capacités de robots de salon sur des personnes qui se montraient bien souvent plus terrifiées qu'autre chose.

Servir le Doom Slayer était gratifiant, mais c'était un excellent moyen de faire se griller le processeur.

"Je suis VEGA, intelligence artificielle crée par le docteur Samuel Hayden pour lutter contre les incursions démoniaques. Les intentions de mon propriétaire à votre égard sont probablement pacifiques, surtout si les activités sataniques ne sont pas votre tasse de thé. De quelle dimension, galaxie ou planête êtes vous originaire ?"

Voilà que l'autre venait de relâcher sa poigne solide en le faisant reculer de deux pas. Alfonzo avait l'espoir à présent que ce n'était pas qu'une simple brute s'exprimant par la force, mais plutôt une brute pourvue d'un certain intellect.

L'homme masqué réajustait légèrement son habit avec ses deux mains pour faire disparaître quelques plis dû à cette capture soudaine. A vrai dire, un simple réflexe qu'il répétait car il n'avait là personne à qui justifier d'une bonne apparence. C'était surtout pour se rassurer d'avoir conservé l'intégrité de son habit. C'était étrange quand même tous ces tics humains qu'il avait assimilé. Il avait sans doute lu trop de livre sur les observations de certaines civilisations, quitte à se calquer sur leur comportement. Le fait qu'il soit possiblement en face de l'un de ses représentants lui avait automatiquement suggéré de se comporter comme tel. Peut-être que c'était nécessaire dorénavant, après tout l'homme en armure n'avait pas eu l'air d’apprécier le stoïcisme dont il faisait preuve. Il devrait sans doute se comporter de façon plus cohérente socialement. Mais hors de question toutefois de paraître apeuré face à son interlocuteur.

Il croisa alors les bras. Et puis non, il les décroisa. Il mit une main sur la hanche, oublia rapidement cette idée. Au final l'être stellaire resta les bras le long du corps. Voilà, comme ça pas besoin de s'embêter. Il n'y comprenait vraiment rien au langage corporel à vrai dire.

C'est à ce moment là qu'il entendit quelque chose, et surtout vit une étrange image apparaître dans un coin du casque de son nouvel interlocuteur. Cette apparition, cette présentation, cette question. Tout ceci valu à l'érudit une excitation particulière, une agréable surprise, une curiosité avide. Beaucoup de questions naissaient dans son esprit à mesure qu'il tentait de relier VEGA à cette présence physique. C'était une symbiose ? Une machine ? En tout cas Alfonzo déduisit très bien qu'ils venaient d'une civilisation plutôt bien avancée. Ce fut d'ailleurs sa première réaction.

"Je suis impressionné de voir que d'autres êtres aient pu mettre au point un Simula Logicae, enfin disons oui... une intelligence artificielle comme vous l’appelez. Je tiens à féliciter le docteur Hayden pour nous permettre d'échanger des paroles dans ce cas. Chez nous, la théorie des intelligences simulées fut mise au point par le professeur Eegual McSquare Rullaby. Un brillant académicien si je puis dire ! Hmm... mais vous n'êtes pas ici pour parler de tout ceci j'imagine. Concernant votre question à présent..."

Il ne prit même pas la peine de noter les allusions démoniaques et sataniques, mais peut-être y reviendrait-il plus tard avec ses propres questions. Pour l'instant le plus important était de se présenter, et pour expliquer d'où l'on vient il faut déjà aussi comprendre où on se trouve et adapter son discours à la personne en face. Alfonzo posa une main sur son menton, pour faire comprendre le temps de réflexion qu'il prenait. Encore une mimique qu'il trouvait inutile, mais qui pouvait s'avérer nécessaire pour d'autres personnes.

"La question est légèrement incorrecte. A vrai dire je ne viens tout simplement pas de cet univers, du moins c'est l'impression que j'ai. On dirait que les longueurs d'onde de ce monde ont quelque chose de plus amusant, ça chatouille un peu plus ! Quand j'ai traversé cette brèche et que je suis arrivé ici, j'ai un peu frissonné d'ailleurs. Voyons... pour faire une analogie c'est comme si vous vous trouviez dans un endroit avec un taux d'humidité différent. Vous allez continuer à vivre, mais ce ne sera quand même pas la même ambiance."

L'être stellaire préférait opter pour une simple analogie plutôt que de partir en formules algébriques. De toute façon, avait-il un quelconque intérêt à devoir expliquer que tout ceci devait sans doute être l'objet d'une variation d'un zeptomètre de la taille du gluon dans cet univers ? Pas besoin de s'arracher les cheveux à expliquer tout ce concept à un pauvre inconnu.

"Quoi qu'il en soit, pour vous donner une idée plus précise de ma localisation, je me situais dans la région du cosmos qu'on appelle la nébuleuse des joyaux, La Gemma Nebula de son nom précis. Dans cette nébuleuse sont nées Seraphyr et Rullaby, un système binaire d'où je viens. Je ne pense pas pouvoir faire plus précis au niveau de mon adresse cosmique. Je peux toutefois vous informer sur mon nom, si cela vous est utile, vu que vous vous être présenté à moi VEGA. On m'a octroyé le nom d'Half-on..."

L'homme au masque s'interrompit aussitôt et grimaça en se rendant compte d'être tombé dans le piège des formalités. Il n'avait plus rien à faire de toutes ces questions d'origines et ce n'était sûrement pas les affaires de ce VEGA, ou de quiconque d'ailleurs.

"Pardon je disais, vous pouvez m’appeler Alfonzo Seraphyr. Je suis un simple érudit qui essaye de comprendre l'univers et ses... caprices. Comme cette brèche que j'ai traversé..."

Un beau caprice spatio-temporel d'ailleurs.

"Cependant, avant de passer à la suite, une question me trotte dans la tête, VEGA. Est-ce vous qui contrôlez ce corps physique ? Ou s'agit-il d'une entité à part entière ? Vous parliez d'un propriétaire et je partais du principe qu'il s'agissait de cet homme, mais on n'est jamais trop sûr."